La Coordination des mouvements de l’Azawad a pris la décision de « réglementer » certains secteurs à Kidal. Dans ces mesures prises, le Cadi se trouve au centre l’appareil judiciaire. Cette annonce est décriée par les avocats mais apprécié par les populations.

Contraventions, délits et crimes sont désormais les secteurs qui seront réglementés dans la ville de Kidal par la coordination des mouvements de l’Azawad (CMA)qui autorise un juge traditionnel musulman (Cadi) à rendre justice dans certains de ces secteurs précités. Nord sud journal a pu se procurer le document de la CMA signé par Alghabass Ag Intalla qui annonce ces nouvelles règles à Kidal. « Les contraventions sont réprimées par les services de répression et en rendent compte aux cadis à travers un procès-verbal. Les délits et crimes ne sont traités que par Ia justice « Alqada », relatif au Cadi, peut-on lire dans ce document de deux pages.
Arsenal réglementaire
Selon le document en question, les motocyclistes et les piétons armés sans pièces justificatives seront conduits devant la justice Alqada pour toutes fins utiles. Leurs motos et armes seront détruites. Cette règlementation régie un certain nombre de domaines non exhaustifs et dont les faits punissables sont ci-après cités par domaine. Il s’agit entre autres du permis de conduire non conforme à la catégorie de l’engin conduit, l’excès de vitesse dans les agglomérations, le chargement volumineux, le stationnement sur la voie publique.
Dans un pays laïc, comme le Mali, la loi sera désormais tranchée dans l’Adrar des Ifohas par un juge traditionnel musulman. Depuis la conquête des régions du Nord par des groupes armés rebelles hostiles à Bamako, une grande partie de l’administration malienne est absente de Kidal. La CMA décide de conférer des pouvoirs judicaires au Cadi.« Pour Ia mise en œuvre de la politique générale de la CMA qu’adjure sa structuration, la nécessité s’impose de la mise en place d’un arsenal règlementaire régissant la vie courante de la société, adapté à ses cultes, à ses us et coutumes », peut-on lire dans le même document datant du 30 janvier dernier.
Une source au sein du ministère de la justice jointe au téléphone nous confie, « cette décision n’a pas pour objectif de remplacer le juge », sans donner plus de détails.
« Kidal est devenu un territoire autonome »
Des avocats ne taisent pas leur colère devant une telle décision qui pourrait pousser d’autres communautés musulmanes du pays à réclamer la même situation. Selon Me Amadou Tiaoulé Diarra, avocat à la Cour, « Il ne peut pas avoir deux réglementations pour la législation dans un même pays. On a du mal à comprendre que les cadis s’occupent des questions pénales», décrie-t-il. « On a l’impression que Kidal est devenu un territoire autonome avec sa propre juridiction qui s’applique à la population et aux étrangers », ajoute l’avocat.
Cette réglementation suscite beaucoup de réactions. Certains maliens pensent comme l’avocat que Kidal a desormais sa propre législation.
En attendant, la décision de la CMA est soutenue par une grande partie des populations locales qui croient que le rôle du Cadi doit être revalorisé comme le stipule l’Accord pour la paix et la réconciliation, issu du processus d’Alger. «A Kidal, la population a plus confiance à la justice traditionnelle plus que la justice formelle. Nos problèmes ont toujours été gérés traditionnellement par des Cadis. Il y a toujours une solution locale à l’amiable chez un cadi », confie un habitant de Kidal sous anonymat.

Par : MOHAMED SALAHA

Nord-sud journal du 15 février 2019

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