Pour une histoire de 100 millions de F CFA offerts par Soumaïla Cissé à Ousmane Chérif Madani Haïdara, le débat religion et politique revient à la « une » de l’actualité au Mali. Si certains fidèles du guide tentent de redorer son blason, plusieurs citoyens sont déçus. Certains vont jusqu’à demander aux religieux,surtout musulmans, de sortir enfin de l’arène politique. 

Les religieux doivent-ils faire de la politique ?Cette question est récurrente depuis quelques années au Mali. Cette semaine, la réflexion a pris une autre tournure après la déclaration de Mahamadou Hawa Gassama, député à l’Assemblée nationale et membre de l’Union pour la République et la démocratie (URD) sur les ondes d’une radio populaire à Bamako. Dans l’affaire des 100 millions de F CFA que l’honorable Soumaïla Cissé aurait offerts au guide spirituel du mouvement Ançardine international, l’honorable Gassama est revenu sur le contexte dans lequel son mentor a fait cette donation.

Selon lui, c’est à la suite d’un deal, préalablement conclu entre l’URD et le guide, assorti d‘un contrat dûment signer entre les deux parties, qu’il a été commissionné avec Gakou, pour remettre les 100millions de F CFA au guide Haïdara. Chose qui a été faite avec même des bonus.Car, selon le député, après leur départ, son patron, Soumaïla Cissé, aurait été saisi par les partisans du guide concernant le montant exact.

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« Ils ont dit qu’il manquait 20 millions de F CFA, car ils n’avaient perçu que 80 millions. Nous avons donc donné 20 millions de plus pour combler le gap afin qu’il n’y ait pas de problèmes », révèle-t-il, rappelant que l’objectif n’était pas d’acquérir le soutien du mouvement, mais plutôt d’avoir les bénédictions du guide qui, a-t-il précisé, leur semblait un homme de foi, « donc proche de Dieu et pouvant l’invoquer pour leur cause », a-t-il dit, ironiquement.

« Rien ne me fait plus mal que d’écouter le gars dire qu’il n’a pas pris d’argent. Dieu est notre témoin et Gakou le sait très bien, même s’il veut le faire de manière diplomatique ». Gassama promet, dans les plus brefs délais,de jurer en public sur le Coran, livre sacré de la religion musulmane. « J’invite Haïdara à faire de même. Je ne parle d’aucun texte, mais du Coran. C’est ma dignité qui est en jeu »,clame-t-il. 

Par ailleurs, il invite les leaders religieux à la retenue. A l’en croire, il dit avoir des dossiers sur l’ensemble des leaders religieux au Mali, excepté M’Bouillé Haïdara et l’imam Mahmoud Dicko, président du Haut conseil islamique du Mali (HCIM). « Qu’ils se taisent. Qu’ils ne nous obligent pas à tout déballer. Nous avons des dossiers. Trop, c’est trop », a-t-il ajouté.

Après sa sortie, malgré ses mises en garde, certains membres du mouvement Ançardine ont posté des vidéos sur les réseaux sociaux pour tenter de redorer le blason de leur guide. D’autres adeptes, évoluant souvent en solo, ont même proféré des insultes et des menaces à l’égard de l’honorable Gassama. V

Un ping-pong en défaveur des leaders religieux

SelonMoussa Touré, sociologue et analyste des questions politiques, ce débat et ces accusations tous azimuts n’arrangent pas les leaders religieux qui,rappelle-t-il, perdent aujourd’hui en notoriété suite à leur implication dans la politique.

« Ils peuvent bien faire de la politique,mais pas ouvertement. La réélection d’IBK, malgré ses mésententes avec le président du HCIM et M’Bouillé Haïdara qui ont soutenu d’autres candidats, est un signe. Les leaders religieux musulmans doivent savoir qu’ils perdent la confiance de leurs adeptes », analyse notre spécialiste, ajoutant qu’ils peuvent les suivre sans  pour autant appliquer leurs consignes de vote dans l’isoloir.

Selon M. Touré, l’affaire des 100 millions de F CFA offerts, pris ou refusés, est un élément déclencheur qui risque d’enfoncer le clou. « La brèche est déjà ouverte, s’ils ne font pas attention, ils risquent d’être la risée de toute la population ».  Il précise : « Sur les radios, pendant la campagne présidentielle, certains leaders ont même été insultés. Et cela pourrait continuer avec cette affaire.Aujourd’hui, les réseaux sociaux facilitent cela ».

Mardi sur les réseaux sociaux et sur certaines radios de la capitale malienne,certains jeunes ont déjà commencé avec les « insultes »et la publication d’anciennes interventions du guide afin de ternir davantage son image. Certains vont jusqu’à lui proposer de « jurer sur le Coran qu’il n’a rien perçu » où de « demander pardon » à la population et  à ses adeptes.« 

Cette affaire de 100 millions de F CFA relance le débat sur l’implication des religieux dans la politique. Jusqu’à quel niveau sont-ils impliqués dans les prises de décisions ? Elle ouvre aussi une brèche sur l’origine de la fortune des guides religieux qui, faut-il le rappeler, figurent dans le top 100 des personnalités les plus riches du pays.

Sory I. Konaté

30minutes.net

3 décembre 2018

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