« Seul le travail assure l’indépendance » Ahmadou KOUROUMA, « Les soleils des indépendances », 1968, Edition du Seuil, Paris.

« Le civisme est une des conditions nécessaires à notre développement » disait Habib Bourguiba, le premier Président de la Tunisie.

I-LA VALEUR « TRAVAIL ».

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  1. Un peuple historiquement « travailleur ».

Qui ne connait pas l’un des adages suivants : « après la pluie, c’est la rosée », ou « on récolte ce qu’on a semé » ou « après l’effort, c’est la récompense » ? 

Le travail est une « valeur » très importante, voire existentielle dans beaucoup de sociétés humaines. A l’exception de rares tribus ou ethniques, qui vivaient de razzias, « travailler et gagner sa vie aux sueurs de son front » est une  des qualités humaines universellement partagées. 

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Le Mali est un pays magnifique, un pays jadis de travail. Justement c’est à cause de leur labeur, que nos ancêtres ont fait du Mali, un pays magnifique qui a une histoire glorieuse formée d’empires, de royaumes. De Kayes à Kidal, chaque communauté, chaque ethnie est fière du passé de ses ancêtres, de sa belle histoire.

Avant la « monétisation » de l’économie, le système d’échange ou de circulation des biens et services entre les populations était le troc : le travail était inévitable. Il fallait obligatoirement travailler pour « troquer » sa production, sa fabrication contre celle d’une autre personne.

« L’impôt (le NI SONKON) était payé en cauris ou en nature » selon la tradition orale. C’est le fruit du travail de toutes les populations très organisées dans une très belle répartition des métiers et des tâches, qui faisait fonctionner les royaumes et les empires. 

C’est parce qu’ils étaient des Hommes d’éthique, de grande qualité, travailleurs acharnés qu’ils ont pu rayonner sur leurs époques, réaliser et construire ce qui fait de nos jours, notre fierté. A titre d’illustration, le « Canal de TIO » ou « Canal de Babougou N’Tji », construit d’il y a plus de trois cent  (300) ans par un des rois de Ségou, dans l’Office du Niger, continue de nourrir les filles et les fils de notre pays.

Le très engagé artiste de reggae, panafricaniste Alpha Blondy a rendu hommage au travail en y consacrant une très belle chanson qui explique bien pourquoi nos ancêtres étaient si acharnés pour le travail : « travailler c’est trop dur, voler c’est pas bon, mendier la charité, c’est quelque chose que je ne puis faire ».

Effectivement nos ancêtres, avaient honte de la mendicité, de l’assistanat « FADEN TO ». Et c’est dans ce sens qu’ils nous éduqués et nous ne pouvons pas les en vouloir.

Je l’avais déjà écrit dans une publication parue dans les « Echos hebdo N°1437 du 06 Janvier 2017, dans un article « Lutte contre la corruption : une bataille à gagner ». Dans les sociétés Maliennes, le travail était considéré comme la « première qualité » d’une personne dans sa communauté. Le travail était « une école ». Les jeunes adolescents devaient assister les parents pour bien apprendre le métier : éleveur, cultivateur, pêcheur, dioula, forgerons. Les jeunes adolescentes apprenaient volontiers les travaux de ménage, préparant ainsi leurs futurs rôles d’épouses et de mamans. On avait l’amour du travail. On grandissait avec la conviction que seul le travail fait la valeur d’une personne.

Dans son livre « Vocabulaire juridique », paru en juin 2005, PUF Paris, 7ème édition, Gérard Cornu définit le travail comme suit :

« Activité humaine manuelle ou intellectuelle, exercée en vue d’un résultat utile déterminé. Dans le langage courant, se confond avec la notion d’activité professionnelle, productrice, d’utilité sociale et destinée à assurer à un individu les revenus nécessaires à sa subsistance. Dans un sens plus restreint, s’utilise souvent pour désigner une activité salariée ».

« Du latin, tripaliare, travailler, c’est torturer avec l’instrument de fortune dit tripalium ».  Effectivement, qu’il soit manuel, physique ou intellectuel, le travail est dur, fait très mal et la pénibilité, pour certains types d’activités, n’est pas loin de la torture. Dans la récitation « le laboureur et ses enfants », de Jean de La Fontaine, le père, pour encourager ses enfants, ne se trompe pas en disant : « travaillez, prenez de la peine », mettant ainsi l’accent sur la dureté du travail.

Ainsi dans un système de retraite à 65 ans, une personne qui finit ses études à 25 ans et travaille pendant 40 ans à raison de 08h par jour, se serait « torturée » pendant 116 800 heures en 40 ans de vie professionnelle.

Il en est de même de nos mamans à la cuisine, des ouvriers dans les usines, au fond des mines, des mécaniciens, des artisans, des artistes, des conducteurs et autres routiers, des employés dans les hôtels, etc. 

On comprend aisément pourquoi certaines populations, tribus, au lieu de travailler, préfèrent se servir dans les fruits du travail des autres, les richesses créées par les autres, par voie de conflits, de razzias, de guerre.

Mais le constat est de plus en plus établi qu’autant nos ancêtres ont magnifié le travail pour bâtir les empires dont nous nous glorifions, autant nous avons tendance à vouloir jouir de la vie sans travailler.

  1. Le constat actuel : la perte du « gout » du travail.

Aujourd’hui, le constat est purement et simplement amer. Au Mali, nous avons perdu le gout du travail. Pour s’en convaincre, passer un mois à observer les Maliens au travail dans les champs, sur les chantiers et les salariés dans les bureaux du public et du privé et tenez les statistiques suivantes:

  • Combien de travailleurs arrivent à l’heure sur le lieu du travail?
  • Combien rentrent avant la fin de la journée ?
  • Combien de Directeurs et d’employés ont un poste de télévision au bureau ?  Mesdames, Messieurs, le cerveau n’est pas programmé pour faire plusieurs choses à la fois, chaque chose à son temps : ou on travaille, ou on se distrait.
  • Combien font correctement les 40 heures de travail par semaine ?
  • Les Projets ? Faites attention aux taux de blocage et à l’état d’avancement, 
  • Combien de temps sont consacrés à la connexion aux réseaux sociaux ?
  • Combien de réunions l’Entité tient y compris le personnel qui participe à des réunions à l’extérieur de la structure ? Nul ne doute que les réunions sont aussi des espaces de communication et de management contribuant aux performances des Entités : que des cadres se réunissent pour débloquer, en une heure, une situation, cela est très important, parfois même inévitable pour l’atteinte des objectifs, mais permanemment des interminables réunions ?  Il y a peut-être une maladie non encore découverte qui s’appellerait la « réunionamie » au Mali. 
  • Où est-ce qu’ils habitent ? Ne cherchez pas à savoir les quartiers de résidence et les meubles qui équipent les maisons, pour ne pas être pris de vertige.

Pendant ce mois d’observation, faites attention au parking de l’Entité tout en observant les va-et-vient du personnel. Vous ne verrez que des voitures de dernière génération de toutes marques. Comment est-ce possible que des gens qui travaillent si peu, soient aussi nantis ?

Ne vous étonnez pas. C’est très simple, nous sommes entrain de prouver au monde, que le travail ne sert à rien, on peut être riche sans travailler. Et nous préparons nos enfants à cela. Déjà à l’école et à l’université, ils ont tout sans avoir travaillé : motos, voitures, maisons, etc. Ce qui explique les deux situations contradictoires aux conséquences très désastreuses que connait le pays : la perte du gout du travail et l’accroc croissant à l’argent.

Première conséquence, en perdant le gout et l’amour du travail, nous sommes en voie de perdre la première bataille dans la lutte contre la mendicité, la prostitution sous toutes ses formes y compris infantile, la pauvreté, les médicaments par terre, en un mot, le sous-développement,

Deuxième conséquence, en perdant le gout au travail, nous sommes en voie de perdre notre indépendance, cette liberté que les pères des indépendances ont chèrement acquise pour nous. Aujourd’hui en Afrique, nous réclamons l’assistanat des ONG. Nous brandissons notre pauvreté justifiant notre statut de mendiants internationaux pour bénéficier de dons, subventions et autres aides budgétaires.

Troisième conséquence, l’accroc sans limite à l’argent et aux biens matériels nous a conduit dans une corruption indescriptible, véritable « arme de destruction massive ». En effet :

  • en raison de la corruption, il y a un renchérissement des prix des produits vendus 2 à 3 fois le prix normal, y compris ceux de première nécessité et les médicaments, les rendant inaccessibles pour une grande majorité des populations. La pauvreté gagne du terrain jour après jour,
  • en raison de la corruption, qui explique en partie l’oubli de nos structures de santé, le système de santé est devenu une « marchandise » vendue aux clients les plus solvables, ayant une certaine capacité financière, laissant aussi une majorité écrasante des populations en marge des soins de santé de base,
  • en raison de la corruption, le système éducatif n’est plus en mesure de former des ressources humaines de qualité, de véritables citoyens. Pire, il est plus destiné à créer des riches d’aujourd’hui plutôt qu’à penser et préparer le futur du pays,
  • en raison de la corruption, notre système de justice ne protège pas suffisamment les droits des simples citoyens lambda. La justice n’est plus rendue de façon « équitable », c’est-à-dire que les mêmes lois sont appliquées différemment selon que le justiciable est riche ou pauvre.
  • en raison de la corruption, notre système de défense et de sécurité est très fissuré, cause, en partie, des recrutements fantaisistes, de complaisance, faisant de l’une des plus grandes armées du continent, craint et dissuasive, en une armée en état de délabrement, mal équipée, mal formée et mal organisée sur le territoire national vaste de 1 240 000 km2,
  • en raison de la corruption, ce « cancer métastasé », qui nourrit tous les maux notamment l’impunité, le fameux consensus, véritable mensonge d’Etat, le contrôle du pays est entrain de nous échapper, on est sur le point de perdre notre pays.

Autant de raisons qui font que la lutte contre la corruption est une bataille qu’il faut absolument gagner. Elle ne se gagnerait pas dans des discours, dans la multiplication des structures de contrôle mais dans des actions fortes comme les remboursements des deniers publics soustraits par les délinquants financiers, la seule manière de dissuader tous nouveaux prédateurs.

Les remboursements ne seraient pas confondus dans les recettes générales de l’Etat. Ils seraient par exemple logés dans un « compte spécial de recette » et destiné au financement des infrastructures d’intérêt général : routes, éducation, universités, santé, aménagements agricoles, énergie, etc., prévues dans le Budget d’investissement des ministères. 

1.3 Tentatives d’explications : comment sommes-nous passés d’un peuple historiquement travailleur en un « peuple de jouissance » ?

Les sociologues et historiens ont un devoir d’édification des populations dans des débats télévisés, radio diffusés et publications. Avec l’œil d’un profane, nous essayons de chercher des explications dans nombreux facteurs dont :

Premièrement, la traite négrière et la colonisation : il est difficile de trouver des explications aux maux qui rongent le continent, à sa situation économique et sociale peu réjouissante, sans faire allusion à l’esclavage et la colonisation. Il est de notoriété que les pays occidentaux, notamment d’Europe et d’Amérique du nord se sont construits au prix du sang de millions de Noirs réduits en esclaves et de millions d’Africains contraints aux travaux forcés par les pays colonisateurs. Les grands intellectuels socio-anthropologues, historiens, chercheurs tels Cheikh Anta DIOP, Jean Philipe OMOTUNDE, Théophile OBENGA, Emmanuel KABONGO MALU, DOUMBI Fakoly, Elikia MBOKOLO, Achille Mbembé, etc. nous apprennent dans différentes publications livres, débats télévisés, conférences vidéos, que le Noir est certainement la race qui a le plus souffert au monde.

Nous comprenons en filigrane que la destruction du tissu culturel par le  matraquage mental, expliquerait en partie le complexe d’infériorité dont souffrent, même de nos jours, beaucoup de noirs. Le complexe d’infériorité a atteint un niveau tel qu’en 2019 encore, plus de 200 ans après l’abolition de l’esclavage et la fin de la colonisation, nos femmes achètent à coup de centaines de milliers de francs, les cheveux des femmes indiennes, brésiliennes mortes pour porter cela sur leurs têtes. Quelle horreur ? Ajouté à la dépigmentation, certaines ressemblent à des zombis.

Elles devraient lire « Lettre à la France nègre », 2003, Edition Bussière Camedan Imprimerie, Paris, Prix Renaudot, dans lequel l’auteur Yambo OUOLOGUEM notre compatriote adresse en tout « treize lettres à toutes les bonnes et mauvaises consciences de France et d’Afrique devant le problème noir ».

Parmi les séquelles de l’esclavage et de la colonisation, l’aspect culturel et mental est certainement le plus dur à réparer. La reprise de confiance en soi peut durer des siècles.

L’éclatement du communautarisme Africain, la naissance de l’individualisme, l’accroc à l’argent et aux biens matériels trouveraient des explications dans les effets de la colonisation avec l’introduction de la monnaie sous sa forme actuelle.

Des modèles de vie nous sont imposés et nous cherchons à coller vaille que vaille à ces modes de vie. Cependant l’esclavage et la colonisation n’expliquent pas tout. D’autres pays notamment asiatiques comme l’Inde, la Corée du Sud, l’Indonésie, le Vietnam, le Pakistan ont été aussi colonisés.    

Deuxièmement, la mauvaise compréhension de la notion de « Droits des enfants », une grosse bêtise que nos pays n’ont pas vu venir. Envoyer un enfant pour conduire les animaux en brousse ou conduire les bœufs de labour, chasser les oiseaux granivores qui dévastent les récoltes, apprendre à pêcher, apprendre à forger, préparer les filles aux travaux de la future épouse, etc. est considéré comme dégradant pour un enfant, inhumain, torturant, contraire aux « droits des enfants », un mode de vie imposé. Nos politiques défendent cela, se rivalisant même pour être le premier pays du « Droit des enfants ». On ne comprend pas qu’on est entrain de détruire une bonne partie du tissu économique, en perdant des bras valides.

L’une des conséquences de cela est l’exode rural. Nos pays se sont retrouvés avec des jeunes sans aucune qualification sur les bras, ne sachant rien faire. Alors, ils viennent grossir les villes. Mais pour faire quoi ?

Des petits boulots, de l‘intermédiation, communément appelés « cocseurs », avec l’avènement de la démocratie, on assiste à la naissance de la profession de « politicien ». Le pire des échecs est le grand banditisme.

Troisièmement, la structure du pouvoir politique: conséquence de la colonisation, les pays Africains ont perdu la structure de leur pouvoir politique d’avant la traite négrière et la colonisation. Elle est remplacée par celle imposée par l’ancienne puissance colonisatrice. La démocratie exige des critères que nous ne remplissons pas, notamment la maturité des peuples pour exiger des programmes visionnaires aux candidats. La conséquence, nous avons en Afrique, plus de Présidents jouisseurs du pouvoir que de travailleurs.

N’en déplaise à ceux qui s’attaquent à l’âge du Président Français. Ce « jeune Président » est travailleur. Il est entrain de réaliser toutes ses promesses électorales. Il aime son pays, protège ses populations et se bat pour leur bonheur, même si cela doit passer par l’empiètement des intérêts des anciennes colonies. « La valeur n’a pas point le nombre des années ».dit-on. Il fait rayonner l’image de son pays dans le monde, contrairement à nos Dirigeants dont certains comportements n’honorent pas l’image de leur pays et du continent.

Ne nous réjouissons pas des « discours populistes de gauche » qui semblent soutenir les Africains dans beaucoup de leurs combats. Au pouvoir, ce serait pire, puisque c’est l’intérêt national qui commande en ce moment. Nous avons applaudi à l’élection du premier Président Américain noir, Barack OBAMA Jr. Au-delà du symbole, chacun peut dresser, selon les informations qu’il dispose, son bilan pour l’Afrique.

C’est à nous de travailler au lieu de chercher la pitié des autres. « Si le lion a pitié de sa proie, c’est lui qui mourra de faim » dit-on. 

En Afrique, nous sommes dirigés par des vieux Présidents plus proches de leurs tombeaux, mais plus jouisseurs de la vie qu’un jeune de 25 ans.  Partis à la conquête du pouvoir sans véritables programmes qu’ils pourraient traduire en « Plans de développement », au pouvoir avec une Assemblée incapable de rectifier les tirs par le vote de budget de développement, ils ne sont tenus d’aucune promesse. Alors à quoi peut-on s’attendre ? Des résultats ? 

Quatrièmement, l’effet de la religion: conséquence de l’aliénation mentale indue par la traite négrière et la colonisation, la religion est devenue une profession en Afrique. Les chefs religieux, dans bien des cas, n’exercent aucune activité, mais ils sont plus riches que les chefs d’entreprise et ne paient aucun impôt. Alors, dans certaines localités de certains pays Africains, il y’a autant, sinon plus d’écoles religieuses que d’écoles modernes. Que vont-ils faire une fois le certificat religieux en poche ?

Dans une famille de 05 enfants dont un seul travaille, « Dieu aurait donné toute la chance des autres à celui-là ». Alors il doit prendre tout le monde en charge. Ensuite on se marie parce qu’on a l’âge et non parce qu’on a les moyens de survenir aux besoins de la famille. Et les enfants qui naissent comment les éduquer, les élever sans moyens ? Pas de soucis, « C’est Dieu qui donne un enfant et IL a prévu la nourriture pour chaque bouche qu’il a créé ».

Au constat final, il ressort qu’en Afrique, et plus particulièrement au Mali, on ne travaille pas assez. Un patron travailleur, rigoureux est même traité de méchant et vilipendé partout dans le pays par ses employés.

Il ne fait aucun doute que seul « le travail assure l’indépendance » nous a déjà dit l’écrivain Ivoirien Ahmadou KOUROUMA, l’Auteur des « Soleils des Indépendances ».

On peut affirmer sans risque d’être démenti que les niveaux de développement atteints par les pays sont fonction du labeur des populations, de l’affection et du respect qu’elles ont pour le travail, la création de richesses, toute chose qui explique le progrès et le développement dans tous les domaines. 

L’amour pour le travail ne vient pas ex-nihilo, c’est la société toute entière qui prépare la personne à l’exemplarité, à « l’amour du travail ».  

II-LES VALEURS « CIVISME ET CITOYENNETE ».

2.1. Des manifestations de la citoyenneté

Sur le passeport Américain, on peut comprendre en filigrane certaines inscriptions comme : « Prenez soin de cette personne, c’est un citoyen Américain, l’Amérique le protège d’où qu’il soit ».

Aussi, savez – vous pourquoi, par exemple la mort, dans certaines conditions, d’un Allemand, Anglais, Canadien, Français, Européen, Japonais, etc., fait trop de bruits et donc fait peur aux dirigeants ?

Dans tous ces pays, la personne accomplit correctement ses « devoirs de citoyens » en payant ses impôts et en participant au choix des dirigeants élus par des votes éclairés. En retour, l’Etat joue véritablement un devoir de protection et de bienveillance sur ses citoyens.

Dans ces pays, le paiement de l’impôt est le premier devoir du citoyen. Il n’y a pas de moyen d’y échapper, en raison de l’identifiant unique. Chaque personne a un et un seul numéro qui l’identifie partout. Avec la numérisation de l’empreint digital, le citoyen est plus jamais identifié et suivi dans tous ses mouvements. Le registre d’état civil correctement tenu à jour permet de connaitre les naissances, les décès et la population théorique du pays, à tout moment. Ainsi le non-dépôt des déclarations fiscales se sait rapidement. Les tricheries sont est maîtrisées, les trains de vie des citoyens étant connus avec une certaine précision : nombre de voyages, le cadastre et le GPS permettent de connaitre tous les propriétaires de maisons.

L’impôt est aussi le prix de cette sécurité, de cette quiétude. La pression fiscale est forte, pouvant atteindre dans certains pays les 75% des revenus du citoyen. En retour, le citoyen exige la qualité de la vie, la quiétude.

En Afrique, la citoyenneté pose de sérieux problèmes. D’une part les populations pensent qu’elles n’ont pas de devoirs, mais que des droits, Au Mali, on rechigne à payer ses impôts, surtout les impôts directs. Alors comment financer le développement ? Par la mendicité auprès des pays nantis pour avoir des dons, des subventions et autres aides, la nouvelle chaine de l’esclavage des générations futures ?

Ensuite, sur un plan purement de la justice sociale, pensez-vous qu’il est normal que l’Etat utilise les impôts payés par d’autres citoyens pour venir au secours d’un citoyen empêtré dans des problèmes, par exemple en Angola et qui ne paie pas d’impôts ?

Certaines personnes justifient de plus en plus, à tort ou à raison, l’incivisme fiscal par les « détournements » supposés des dirigeants. Quand on observe les trains de vie des Représentants de l’Etat : immeubles, maisons, véhicules, soins de santé à l’étranger, enfants dans les universités à l’étranger, etc., peut-on leur donner vraiment tort ? Surtout que dans notre pays, on enregistre rarement de « plaintes pour accusation à tort de malversations ». En outre les citoyens assistent, impuissants, à la vente des biens du « patrimoine national » par des Dirigeants sans qu’une utilisation claire des produits de la vente ne leur soit signifiée à travers leur représentant : l’Assemblée Nationale.

Enfin, il est reproché aux Dirigeants de ne pas avoir suffisamment de volonté pour mettre en place un cadastre digne de ce nom depuis 30 ans (depuis le Projet CARPOL) et un identifiant unique le NINA, depuis 2009, soit bientôt 10 ans. Le flou arrangerait plus les gouvernants que les gouvernés et les administrateurs plus que les administrés.

De leur côté les Dirigeants accusent les populations de ne pas payer d’impôt. Certaines statistiques donneraient même le taux de 47% seulement de Maliens qui paient des impôts. Ce taux ne concernerait, à notre avis, que les impôts directs, puisque les impôts indirects TVA, les Taxes sur les activités financières, les Taxes spéciales sur les télécommunications et les Droits de Douanes inclus dans le prix de vente des produits importés, sont payés par tous les citoyens en tant que client consommateurs final. 

Nous pensons que dans le match de la citoyenneté entre populations et Dirigeants, la balle est dans le camp des Dirigeants à tous les niveaux. Ils sont allés battre campagne, faire des promesses aux populations pour se faire élire. Ils doivent recruter des « personnes de qualité » qui démontreront le bon usage qu’ils font de l’argent public provenant d’impôts et taxes payés par les sociétés industrielles, commerciales, banques, assurances, et surtout par les citoyens les plus gros contributeurs de la TVA. De l’observation des statistiques de la DGI, la TVA contribue en moyenne, à elle seule autour de 55% des recettes du Budget général.

Dans les débats sur les politiques fiscales, entre universitaires et hommes politiques les argumentations sont de plus en plus en faveur d’un allègement de l’imposition directe (impôt sur les salaires, les bénéfices, les dividendes, les loyers, etc.), et d’une forte fiscalité indirecte : TVA et autres taxes sur le chiffre d’affaires. 

En effet, un allègement de l’imposition directe entrainerait une amélioration des pouvoirs d’achats des citoyens, et de l’épargne, qui à son tour engendrerait l’accroissement de l’investissement productif, qui boosterait les activités économiques pour plus de création d’emplois et de valeur ajoutée et encore plus de TVA et de taxes sur le chiffre d’affaires.

2.2. De la notion de citoyen et de citoyenne.

Le Larousse définit le citoyen (ne) comme : « membre d’un Etat considéré du point de vue de ses devoirs et de ses droits civils et politiques ». Ainsi défini, chaque Etat et la société à travers des règles précises de bonne conduite, participent à la préparation du type de citoyens et de citoyennes qui auront les lourdes charges et responsabilités de conduire les affaires du pays. 

Les sociétés maliennes sont riches d’excellentes règles qui préparent l’enfant à ses futurs rôles dans la société et dans la vie de la Nation, en un mot à être de bons citoyens. On peut citer entre autres parmi :

  • les valeurs : la justice, la primauté de la communauté et la collectivité, la générosité et le partage, le respect de la parole donnée et le serment, la loyauté et la fidélité, la vérité, la politesse, le respect dû aux aînés, le respect de la femme, la dignité et la honte, l’honnêteté, l’honneur et la préservation du nom de famille pour toute la communauté, le respect de la propriété d’autrui, le respect de la chose de la communauté, le travail, la bonté, le courage et la bravoure, l’acceptation de l’autre dans sa différence, etc. 
  • et les contraires de ces valeurs : l’injustice, l’individu, l’individualisme et la cupidité, l’ingratitude et la trahison, la déloyauté et l’infidélité, le mensonge et la tricherie, l’impolitesse, l’indignité et l’éhonté, la malhonnêteté, le déshonneur, le vol, l’utilisation ou se servir dans la chose de la communauté, la paresse, la méchanceté, la peur, le rejet de l’autre ou l’intolérance, etc.

Des écrits du célèbre intellectuel Amadou Hampaté BA comme : « L’étrange destin du wangrin » dépôt légal 1979, tirage 2007, Editions 10/18, Paris, et « Amkoullel, l’enfant peul », paru aux éditions J’ai lu, 2005, Paris, regorgent de nombreuses sagesses et règles de conduites qui préparent la personne la citoyenneté.

Une personne éduquée dans ces vertus, était pétrie de valeurs, connaissait ses origines, avait un encrage social qui le rendait difficilement manipulable, était un véritable citoyen, ne pouvait pas être un voleur, un pilleur de la chose publique. Il ne pouvait pas non plus songer à trahir, un instant, sa communauté et le pays.

Ces valeurs n’ont pas totalement disparues, elles sont toujours vivaces, portées par un autre type de Maliens, colonisé, mentalement et culturellement aliéné, mettant en exergue un contraste entre le contenu et le contenant. On ne fait pas ce qu’on dit. Le paraitre l’emporte sur le fond, on n’est pas réellement ce qu’on est.

La recherche effrénée de l’intérêt personnel, le goût prononcé pour l’argent et les biens matériels, font sombrer une personne bien instruite hautement diplômée, dans la corruption, le « détournement » de la chose publique, le mensonge, la tricherie, l’ingratitude, la trahison, en un mot, tous le contraires des vertus et font de cette personne une pire citoyenne.

Ailleurs, sous d’autres cieux, dans le livre « Les Entretiens de Confucius », collection connaissance de l’orient, paru en 1987 aux Editions Gallimard, Paris, on apprend que Confi cuis fait partie des « humanités classiques asiatiques », un grand philosophe Chinois, enseignant de la morale de l’éthique et des bonnes règles de conduite, qui  a vécu 300 ans avant Jésus Christ.

Dans un excellent livre, intitulé « Petit traité des grandes vertus », paru en 1995, aux éditions PUF, Paris, le Philosophe Français, André Comte-Sponville, traite de dix-huit vertus qui préparent l’enfant à la citoyenneté. Ces vertus sont :

« La politesse, La fidélité, La prudence, La tempérance, Le courage, La justice, La générosité, La compassion, La miséricorde, La gratitude, L’humilité, La simplicité, La tolérance, La pureté, La douceur, La bonne foi, L’humour et L’amour ».

Dans le résumé, il est sans équivoque : « Mieux vaut enseigner les vertus que de condamner les vices. La morale n’est pas là pour nous culpabiliser, mais pour aider chacun à être son propre maître, son unique juge. Dans quel but ? Pour devenir plus humain, plus fort, plus doux ».

Beaucoup de vertus sont acquises à travers l’éducation familiale et auprès de la société toute entière. Au Mali, plus qu’ailleurs, l’enfant appartenait à la communauté.

L’un des rôles de l’Etat, c’est de contribuer à la construction de la citoyenneté par l’enseignement civique et moral : « La discipline enseignée à l’école primaire et au collège destinée à préparer les élèves à leurs rôles de citoyen ». LAROUSSE. Les Partis politiques aussi devraient s’impliquer fortement dans la construction citoyenne de l’électorat.

Ainsi préparés à ses rôles dans la nation, le citoyen est à même d’accomplir correctement ses devoirs et ses droits dans le fonctionnement normal de l’Etat. La participation des populations à la couverture des dépenses publiques à travers le paiement des impôts, droits et taxes et le non-détournement de la chose publique sont des manifestations majeures de la citoyenneté.

En conclusion de ce papier, il est important que nous menions un travail de réflexion soutenu pour trouver rapidement des solutions à la crise qui est entrain de détruire à petit feu notre pays. Dans une publication parue respectivement dans « Mali Tribune » N°44 du 23 Août 2019 et dans les « Echos Hebdo », intitulé « Les risques courus par notre pays : l’autonomisation des régions, la partition et l’Azawad sans les Azawadiens », nous avions mis le doigt sur la dette colossale de « libération » que notre pays est entrain de contracter jour après jour.

Cinq mois après le Président TRUMP vient de nous donner raison. Le cas de l’Irak doit nous inspirer. Le Parlement Irakien vote le départ de toutes les forces étrangères le lundi 06 Janvier 2019, le Mardi 07, le Président Américain sort la facture de la « libération du peuple Irakien du dictateur Saddam Hussein » pour leur dire en filigrane : nous pourrions partir, mais payez d’abord notre facture. A combien s’élève-t- elle ? Certainement des milliers de milliards de dollars.

Les souffrances du Noir, décrit par nos éminents intellectuels sont loin d’être finies. Le chemin de la maturité est encre très long pour les peuples africains. Leurs grands-parents ont réduit nos grands-parents en esclaves, en colonisés, eux sont entrain de nous malmenés à souhait, et sûrement c’est dur à entendre, mais leurs générations futures risquent de réduire nos générations futures en esclaves. Fuir l’Afrique pour migrer chez eux ne mettra personne à l’abri de cet esclavage.

Pour le Mali, qui nous concerne directement, tant que le sous-sol de notre pays regorgerait d’importantes ressources, Tant que notre pays n’aurait pas de vision économique claire qui permettra de mettre en place les politiques et les moyens d’exploiter les supposées immenses ressources. Tant que les grandes puissances auraient besoin de matières premières pour faire tourner leurs usines, Tant que des ethnies, des cadres avides d’argent et des perdants politiques seraient manipulables, notre pays ne retrouverait jamais la stabilité et la paix tant recherchées. Les velléités identitaires et indépendantistes seront toujours utilisées en permanence comme arme pour nous mettre dos-à-dos.

On pourrait manifester, marcher tous les jours, exprimer notre colère, insulter la France politique, demander le départ des forces étrangères, cela ne suffirait pas. Nous avons eu le courage de les appeler au secours, ayons le courage de négocier les conditions de remboursement de notre « dette de libération » pour mettre fin aux calvaires et souffrances de nos populations d’aujourd’hui et celles des générations futures./ (à suivre)..

Siné DIARRA

Expert-ComptableEnseignant de Comptabilité de finances et d’Audit

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