Mahamadou Aly Haïdara, doctorant en Droit Public, Chef de la Division des Affaires Juridiques de l’Autorité de Protection des Données à caractère Personnel (APDP) revient sur les violations courantes et les précautions à prendre en matière de protection de la vie privée.

Mali Tribune : Qu’est-ce qu’un délit ?

Mahamadou Aly Haïdara : Le délit est une infraction d’une gravité qui se situe entre la contravention et le crime. A cet effet, sauf dérogation, il est jugé par un tribunal correctionnel.

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Comme les autres infractions, le délit est le non-respect d’une règle de loi. Pour le différencier de la contravention, ce type d’infraction expose son auteur à une peine d’emprisonnement. Ainsi, pour ne pas le confondre à un crime, le législateur malien a prévu une peine d’emprisonnement n’excédant pas 10 ans. Toutefois, la peine d’emprisonnement n’est pas systématiquement infligée par le juge qui, conformément à la loi n°01- 079 du 20 août 2001 portant code pénal, dispose le pouvoir de prononcer d’autres types de sanctions notamment, l’amende.

Mali Tribune : Les parents d’une victime peuvent-ils poursuivre judiciairement les auteurs ?

M. A. H : En droit civil, il est clair que « tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute de qui il est arrivé à le réparer ». En principe, seule la personne concernée par une violation de ses données personnelles peut porter plainte devant l’APDP et les autorités judiciaires. Cependant, les droits des majeures curatelles et les mineurs peuvent être défendus par leurs représentants légaux.

Mali Tribune : Existe-t-il une sanction pour violation de données à caractère personnel ? Si oui, que dit la loi ?

M. A. H : En application des dispositions de la loi n°01-079 du 20 août 2001 susmentionnée et celle n°2013-015 du 21 mai 2013 modifiée, portant protection des données à caractère personnel, le fait de procéder ou de faire procéder à des traitements de données à caractère personnel sans que les formalités déclaratives prévues par la loi aient été respectées expose le responsable du traitement en question à des sanctions administratives et/ou pénales. Sont également sanctionnés par l’Autorité de Protection des Données à Caractère Personnel : le fait par toute personne de procéder ou de faire procéder à un traitement de données à caractère personnel sans prendre toutes les précautions utiles pour préserver la sécurité des données conformément aux prescriptions de l’article 8 de la n°2013-015 du 21 mai 2013 modifiée, et à la délibération n°2020-034/APDP du 12 février 2020 portant adoption du référentiel relatif aux mesures de sécurité et de confidentialité des données à caractère personnel ; le fait de communiquer à des tiers non autorisés ou d’accéder sans autorisation ou de façon illicite aux données personnelles mettant en cause les droits fondamentaux et les libertés individuelles ou la vie privée ; le détournement de finalité ou toute modification de finalité d’une collecte ou d’un traitement de donnée personnelle, sans autorisation expresse et motivée de l’Autorité de Protection des Données à Caractère Personnel ; le fait de collecter des données par un moyen frauduleux, déloyal ou illicite ou de procéder à un traitement d’informations nominatives concernant une personne physique malgré son opposition, lorsque cette opposition est fondée sur des raisons légitimes liées à ses droits fondamentaux ou à sa vie privée ; le traitement automatisé de données à caractère personnel nominatives ayant pour fin la recherche dans le domaine de la santé, en violation des lois et règlements ; le fait, hors les cas prévus par la loi, de mettre ou de conserver en mémoire informatisée des données nominatives concernant des infractions, des condamnations ou des mesures de sûreté nationale ;  le fait, par toute personne, de recueillir, à l’occasion de l’enregistrement, du classement, de la transmission ou d’une autre forme de traitement, des informations nominatives dont la divulgation a pour effet de porter atteinte à l’honneur et à la considération de l’intéressé ou à l’intimité de sa vie privée, de porter sans autorisation de l’intéressé lesdites informations à la connaissance d’un tiers qui n’a pas de qualité pour les recevoir ; le fait de mettre ou de conserver en mémoire informatisée, sans l’accord préalable de l’intéressé, des données nominatives qui, directement ou indirectement, font apparaître les origines raciales, ethniques, les opinions politique, philosophique, religieuse ou l’appartenance syndicale.

Ces sanctions font de 2 500 000 à 20 000 000 de F CFA.

Mali Tribune : Selon vous, qu’est-ce qu’il faut faire pour freiner ces dérives sur Internet ?

M. A. H : Avec le développement du cyberespace qui a facilité la communication instantanée d’informations et le stockage illimité de celles-ci, notre vie privée est sérieusement mise à mal. 

Nous n’avons pas suffisamment conscience, et plus particulièrement les jeunes générations, qu’en exposant notre vie privée sur ‘’Internet’’ nous renonçons à une part de plus en plus importante de notre vie privée, et de ce fait nous risquons de porter atteinte, de manière ‘’irréversible’’, à notre espace intime et à nos droits fondamentaux.

Ainsi, nous devons tout simplement retenir que sur les réseaux sociaux, nous sommes comme à la table d’un restaurant : « un moment privé mais dans un espace public ; tout le monde nous voit et nous entend. Alors, très simplement, adoptons les mêmes limites sur internet que lors d’un repas au restaurant ».

Propos recueillis par

Bintou Diawara

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