Qui pour présider la 6è législature de l’Assemblée nationale ? La question n’est pas simple, et les candidats sont nombreux, sans qu’aucun ne fasse l’unanimité autour de son nom. Les uns et les autres ont commencé et une campagne et apparemment, aucun n’est disposé à lâcher. Avis de tempête chez les Tisserands.
En matière d’élection du président de l’Assemblée nationale, et de nomination du parti de façon générale, l’Adéma avait instauré une jurisprudence : il fallait respecter la hiérarchie au sein du parti. C’est ce raisonnement qui avait conduit le parti à choisir le professeur Aly Nouhoum Diallo comme président de l’Assemblée nationale, plutôt que le Professeur Tiémoko Sangaré qu’il coiffait dans le parti.
Puisque le RPM n’a pas installé de règle en la matière, il se trouve bien mari dans sa situation actuelle, n’ayant aucune règle lui permettant de trancher en toute indépendance. En effet, en son temps, le président sortant, Isaac Sidibé, était un illustre inconnu au BPN.
Dans tous les cas, l’élection/nomination du président de l’Assemblée nationale repose sur une base : Il faut être du parti majoritaire, ou de la majorité présidentielle ou être adoubé à ce niveau. C’est vraiment le tournis au niveau du RPM. Il y a ceux qui cherchent au moins à pouvoir trouver et justifier un mode d’élection et il y a ceux qui sont candidats.
D’abord le mode d’élection. La règle républicaine veut au moins que le Bureau politique du parti majoritaire, au moins, soit choisisse, soit fixe des règles. Cela a l’avantage que le président élu/nommé ne se sentira pas en territoire conquis, mais en mission. Cet exercice, bien entendu, se fait en tandem avec le président de la République. Puisqu’il a besoin d’une passerelle sûre et forte avec sa majorité, à défaut de complicité, il doit être impliqué. Cependant, toute la difficulté vient du fait qu’on a comme l’impression qu’il y a un ressort qui s’est cassé, que la confiance ne règne pas entre les tisserands et le père fondateur.
Il est impensable que le choix du président de l’Assemblée puisse se faire contre le Président de la République. Et tout le dilemme réside à ce niveau. S’il n’est pas en phase avec les députés, ces derniers peuvent se coucher, la ravaler pour des raisons et d’autres, sans jamais aller au charbon après, sans mouiller le maillot. Or, c’est connu, les pires moments pour un président de la République, sont les dernières années, quand souffle l’atmosphère de fin de règne, le moment « où tous les rats veulent quitter le navire« , où tous ceux qui veulent se soustraire de la corvée de la vaisselle, cherchent à quitter la table.
Il est indispensable qu’il ait un dialogue direct entre Koulouba et la Place de la République. Or, à ce jour, ce sont des intermédiaires qui font la navette, avec des messages tronqués, mal rendus, des explications de textes et d’attitudes, des ressentiments de part et d’autre. Rien ne vaut une bonne explication face à face, avec après, une poignée de mains franche.
Les candidats sont nombreux pour le perchoir. Il y a ceux qui se croient légitimes, ceux qui croient que leur heure est arrivée et les embusqués, qui, en outsiders, se positionnent en plus petit dénominateur commun, au cas où.
Il y a le président sortant, monsieur Sidibé. Il est le seul à penser qu’il peut être reconduit. Il a franchement été une honte pour l’institution, et n’a rien fait pour redorer le blason. D’ailleurs, il est curieux de constater qu’il n’est cité par personne, alors que, normalement, il est celui qui aurait dû être en première ligne. Il n’a aucune chance, mais, il est celui à qui les divisions actuelles pourraient profiter.
Il y a l’avocat maître Baber Gano. Rien que d’évoquer son nom fait faire des mous de désapprobations aux interlocuteurs du RPM. Mais, il a des arguments. D’abord, il est le plus gradé, politiquement, en sa qualité de secrétaire général du parti. Ensuite, ancien ministre, il est le seul ministre qui a accepté de descendre dans l’arène. Il a pour faiblesse de ne pas réunir beaucoup de consensus autour de son nom.
Il y a Timbiné. Il a été repêché par la Cour constitutionnelle. Dans un tweet, le député de la Commune II, Karim Kéita, qui a ouvert les hostilités, voulant certainement mettre fin à la guerre qui n’était que feutrée, a dit qu’il apportait son soutien au vice-président sortant et représentant de la jeunesse au BPN.
Le troisième larron
Il n’a pas fallu plus pour courroucer tout le parti, qui n’a pas compris comment ce choix peut se faire en dehors des instances du parti. D’ailleurs, ni la position de Karim Kéita, ni les déclarations d’après, ne sont pour calmer la situation. En effet, un communiqué signé de la jeunesse de la majorité présidentielle apporte après son soutien à Timbiné. Ce dernier a été vice-président dans le bureau sortant, et avec toute la générosité, on trouverait difficile des hauts faits à son actif. Son autre handicap serait l’inimitié que lui porte le président du parti, et qui voit en menace cette promotion de celui qui est dit avoir bloqué sa candidature.
Le plus curieux est justement le silence assourdissant du président du parti. Il semble complètement largué, dépassé par les événements, incapable de siffler la fin de récréation, de rapatrier au sein du parti les débats et les oppositions. Il sait que ses jours sont comptés à la tête du parti et semble plus préoccupé à se trouver un ancrage.
Il y a également Diarassouba. Du haut de sa grande victoire et de son exploit, il semble comme sonné, ne comprenant pas que sa fidélité au président IBK puisse être mise en doute. Questeur sortant, étant le seul parti avec une liste propre, il est également un candidat au perchoir et veut des explications. Il a pour lui ses hauts faits d’armes et son parcours.
Cependant, les uns et les autres se demandent de plus en plus, s’il n’y a pas une « troisième voies« possible ? Pourquoi ne pas élargir la prospection à la majorité présidentielle ? Cela présente de multiples dangers. Le président de l’Assemblée est élu pour 5 ans. IBK est à son dernier mandat. Serait-il prudent d’offrir une telle faveur à quelqu’un qu’on ne maîtrise pas ? Car, en politique, aucune entente n’est figée dans du marbre et la réalité changeante déteint forcément sur les attitudes et les postures.
En tout état de cause, seul IBK est déterminent. Il ne doit pas se déterminer à la légère. Il doit juger et tous les candidats sans a priori, sans sentimentalisme, avec une grille simple : quelle est son degré de fidélité, quelle est sa prise sur les députés, quel est son poids politique.
Alexis Kalambry