« Le e-learning se pratique surtout par des structures privées »

Etudier à distance notamment via internet est devenu normal. Des écoles virtuelles voient le jour un peu partout. Au Mali, le e-learning est encore timide. Bakary Kouyaté, gestionnaire du centre d’incubation de l’Agetic nous éclaire sur la problématique.

Mali Tribune : Comment vous définissez le e-learning ?

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Bakary Kouyaté : Le e-learning est l’apprentissage en ligne à travers les plateformes. On l’appelle également la formation à distance. Les cours sont dispensés sous forme de vidéos, audio ou textes. La formation en ligne demande assez de courage et d’efforts car l’étudiant est obligé de faire des recherches complémentaires.

Mali Tribune : Au Mali on considère encore la connexion internet comme un luxe, comment percez-vous la pratique du e-learning ?

B. K. : Aujourd’hui, la connexion a été démystifiée. Avant, elle était considérée comme un luxe. Actuellement, elle est une nécessité. Je vois le e-learning au Mali sous beaucoup d’angles. Au Mali, on a un problème d’enseignants, de spécialistes dans certains domaines, d’infrastructures c’est-à-dire le manque de salles, d’amphis etc.…

En prenant par exemple 10 facultés où vous avez plusieurs filières, vous êtes obligés d’avoir un enseignant pour chaque classe et amphithéâtre. Et s’il faut toujours continuer avec le système classique en cherchant des enseignants, en construisant des établissements, je pense que cela n’aura plus de sens. Aujourd’hui, le nombre d’élèves et étudiants augmente et en réalité on n’a pas assez de ressources pour faire face à ces différentes problématiques.

Je pense que le e-learning peut être une alternative pour pallier toutes ces insuffisances auxquelles notre enseignement est confronté.

Mali Tribune : Le gouvernement malien a-t-il mis à la disposition des étudiants des plateformes d’apprentissage en ligne ?

B. K. : A ma connaissance non. Je connais quelques ONG qui ont déjà essayé d’expérimenter le concept, telle que l’agence universitaire de la francophonie sur la colline. Ils avaient des formations à leur niveau qui se passaient en France. Les gens s’inscrivaient et prenaient leurs cours à partir de la salle numérique. Au début, il y avait un problème de connexion au Mali donc les gens s’abonnaient au campus numérique francophone pour pouvoir suivre leur cours en ligne. J’intervenais moi-même dans de pareils programmes de formation. On prenait des étudiants de l’Ena, la Flash et d’autres écoles en vue de les former sur la plateforme.

Actuellement quelques universités ont commencé à s’y intéresser tel que l’Ispric. Ils ne diffusent pas des cours de l’extérieur mais ce sont eux-mêmes qui dispensent leur cours sur la plateforme. L’université polytechnique virtuelle du Mali a aussi été créée en novembre 2019 par la Famib, groupe UV Mali. Je ne suis pas au courant d’une plateforme d’apprentissage en ligne que l’Etat malien a mise en place. L’initiative vient toujours des structures privées.

La chance allait venir avec la Covid-19, parce que les écoles ont été fermées donc l’enseignement était arrêté. Il y avait une dynamique qui avait commencé au Mali, mais ils ont opté pour l’enseignement à la télé et à la radio. C’est aussi un apprentissage à distance mais ce n’est pas aussi structuré que ça. Si on veut mettre en place un concept pareil, il faut prendre chaque cycle d’enseignement et respecter le programme comme dans la méthode classique.

Mali Tribune. : Les étudiants, selon eux, ont du mal à mieux exploiter les plateformes déjà en place et liées à l’enseignement supérieur, comment vous expliquez ces erreurs ?

B. K. : Je vois deux problématiques à ce niveau. Il y a une qui est liée aux étudiants eux-mêmes et l’autre aux administrateurs. Aujourd’hui, tous ces étudiants possèdent chacun des comptes Facebook, twitter et autres. Ils font tout ce qu’ils veulent sur internet sans que quelqu’un les forme. Mais dès qu’on veut les amener vers le sérieux sur internet, c’est là où ils vont évoquer tous les problèmes du monde. Il faut se dire la vérité, ils n’aiment pas apprendre. C’est pourquoi on voit moins d’étudiants maliens sur les universités virtuelles, telle que l’université du Sénégal. Généralement ce sont les professionnels qui s’y intéressent beaucoup. Les gens pensent que l’enseignement en ligne est facile par ce qu’ils pensent qu’ils ne sont pas devant le professeur donc qu’ils peuvent organiser leurs programmes comme ils le veulent. Alors que l’apprentissage à distance est l’enseignement le plus compliqué. Avec cette méthode, on est notre propre formateur et si on manque la culture de lire on s’en sort difficilement.

Mali Tribune : Que faut-il pour un bon fonctionnement des formations en ligne ?

B. K. : Avec le e-learning, un professeur peut avoir 10 000 étudiants à la fois. Mais il faut que les moyens soient là. Qu’il y ait facilement accès à la bonne connexion et à l’électricité pour éviter les coupures et la mauvaise qualité de réseau internet. La gestion de la plateforme des cours à distance demande aussi beaucoup d’organisation. La plateforme est une interface entre les étudiants et les enseignants. Il faut donc une batterie de ressources personnelles. Aujourd’hui, qu’on le veuille ou pas, nous allons finir par les cours à distance. Je ne dis pas par-là que l’enseignement classique va disparaître, mais il connaîtra un grand bouleversement.

Mali Tribune : En comparant à la méthode classique, quels sont les avantages de e-learning ?

B. K.: Chaque chose a son inconvénient et son avantage. Le coût de l’enseignement classique est très élevé par rapport à l’enseignement à distance. Alors qu’à la fin du cycle on obtient les mêmes diplômes valables. Le e-learning ne demande pas de frais de logements, de nourritures et transports. Et si l’étudiant a le courage, il peut faire plusieurs masters en même temps.

On s’est rendu compte avec l’avènement de la pandémie du Covid-19 combien, les TIC ont de la valeur et qu’ils permettent de résoudre certains problèmes auxquels on n’avait pas pensé. Pendant le confinement, tout a été presque arrêté. Les gens ne partaient plus au travail, les étudiants et les élèves ne partaient plus à l’école. C’est avec les TIC qu’on a assuré la continuité des activités en mettant en place l’enseignement à distance, le télétravail, la téléconsultation etc… Il est incontournable d’opter pour le e-learning. On peut dire qu’il a un grand avantage pour le Mali. Il faut que les autorités maliennes comprennent et agissent dans ce sens.

Fatoumata Kané

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