Depuis plusieurs semaines, les vidéos des Aigles du Mali circulent sur les réseaux sociaux pour expliquer leur refus de jouer lors de la 3e fenêtre qualificative à la Coupe du monde 2023. Celui-ci a conduit à l’élimination de la course à la qualification du dernier tour des éliminatoires de la Coupe du monde de Basketball. La fédération n’a pas cherché à apaiser les tensions et n’y va pas de main morte en radiant sept joueurs de la sélection nationale et de toutes activités liées au basket dans le pays.
Le joueur Ibrahim Djambo explique: « On nous a fait des promesses, on nous a dit des choses, on est arrivé à Kigali pour jouer, et arrivés ici, il n’y a rien qui est fixé, rien qui est fait». Il demande « un minimum de respect, on veut du changement, un respect de notre boulot, on vit de ça »!
Plusieurs de ces joueurs ont également permis à l’équipe nationale de terminer deuxième du mondial de Basketball U-19 en 2019, s’inclinant face aux États-Unis. Ils avaient battu les champions du monde en titre, l’équipe du Canada et plusieurs grands favoris de la compétition.
Plus récemment, Ibrahim Djambo indique les cas d’« Oumar Ballo vice-champion du monde, les féminines, 3e du championnat d’Afrique, ont touché zéro Francs CFA ».
« Tout récemment ils ont eu deux victoires, les primes de victoire n’ont jamais été payées après le match, il y a même des primes qui ont pris 4 ans», comme l’explique le directeur technique adjoint, Mamadou Boubel Konaté, à Basketmali sur Facebook.
Ces joueurs et ces joueuses font rayonner le basketball malien dans toute l’Afrique, et dans le monde entier, avec les meilleurs résultats jamais obtenus par une équipe africaine dans ce sport. Le nombre de jeunes jouant au basket a considérablement augmenté ces dernières années dans le sillage de ces nouveaux héros.
Par cette décision ils s’exposent à la vindicte populaire : « les gens vont nous traiter de tout ce qu’ils veulent, qu’on n’est pas patriotes, mais si on le fait on connaît le sacrifice, on connaît ce qui peut arriver après on le fait pour que les choses changent. On demande pardon au peuple malien, car c’est pour lui qu’on joue, on le fait pour le changement des autres générations » et de combattre ainsi l’injustice.
Ces interventions ont provoqué une véritable hystérie sur les réseaux sociaux. Ils sont félicités et encouragés dans leur lutte contre des instances sportives et politiques corrompues. Les quelques donneurs de leçon en matière de patriotisme sont moqués sur leur soutien à des instances qui ne tiennent pas leurs promesses et ne respectent pas des joueurs de renommée mondiale!
Une affaire sportive qui prend une tournure politique
Les internautes n’acceptent pas que M. Konaté invoque les sanctions de la CEDEAO et celles de l’Union européenne pour justifier le non-paiement des primes des joueurs. Certains commentaires se demandent même si les joueurs auraient pu avoir leur salaire s’ils avaient été des mercenaires. Une allusion à peine masquée aux fortes sommes qui sont versées aux Russes qui n’ont pas un palmarès aussi brillant : ils n’arrivent pas à protéger les populations dans les zones où ils interviennent, ni à débloquer la RN16 depuis plusieurs semaines.
Les véritables patriotes sont bien ceux qui ont déjà réussi à porter les couleurs de leur pays au plus haut. Ils sont d’autant plus méritants qu’ils se sacrifient pour faire évoluer les conditions de leurs camarades féminines, des plus jeunes et des futures générations.
Espérant que la fédération malienne et le ministère des sports reprennent ses esprits et respectent ses joueurs et ses engagements afin de leur redonner les moyens de revenir au plus haut niveau et de faire briller les yeux des Maliens.
Siaka Sidibé
Analyste, conttribueteur pour 30minutes.net et Mali Tribune
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