Le cercle des jeunes écrivains maliens s’élargit. Issa Tiory Konare s’y invite avec son livre intitulé ‘’L’Esprit de la fraternité’’, un conte destiné à des enfants mais aussi à des adultes qui met en exergue l’esprit de la fraternité, base de l’amour et socle de tout épanouissement au sein de la société. Nous avons échangé avec l’auteur sur son premier ouvrage publié chez Edilivre !
Présentez-vous à nos lecteurs
Je me nomme Issa Tiory Konare je suis littéraire en formation après une licence en lettres à la la Faculté des Langues et Sciences du Langage de Bamako en filière lettres je continue mes études en France toujours dans le domaine littéraire, où j’obtiens une équivalence de mon diplôme de licence à l’Université Paris XII -Villetaneuse. Je suis actuellement en première année de master en Sciences du Langage et dois soutenir un mémoire en septembre sur L’analyse syntaxique du mot « comme ». Je suis l’auteur du conte ‘’L’Esprit de la fraternité’’
Parlez-nous de votre ouvrage ‘’L’Esprit de la fraternité ‘’!
Vous les journalistes, combien vous êtes curieux ! Ok. Chaque fois qu’on demande à un auteur de parler de sa production, c’est avec un plaisir qu’il répond ; c’est un enthousiasme. Pour répondre à votre question, je vous précise d’abord que L’Esprit de la fraternité rime avec L’Esprit des lois de Montesquieu, mais les deux ne sont pas du même genre, ni du même style : l’un est un conte, l’autre est un essai. Dans L’Esprit de la fraternité, il est question de fraternité, c’est-à-dire aussi de solidarité et surtout d’esprit collectiviste. Cela veut dire : nul ne peut rien sans les autres, l’homme c’est les hommes…On est tous frères, surtout nous Maliens, nous sommes exactement les mêmes, c’est pourquoi nous devons nous donner les mains et combattre les obstacles qui bouchent l’horizon de notre démocratie. Nous devons prendre soin de nous-mêmes, face à la tentation, face à la manipulation intérieure en premier et ensuite à la manipulation extérieure.
Ce livre nous dit : prenons soin de nous dans la divergence des religions, dans la différence des ethnies, dans la diversité culturelle et linguistique. Nous devons être conscients que sans esprit fraternel, il n’y a pas de démocratie. Il ne s’agit pas de la fraternité au sens large, mais au sens philosophique : les citoyens d’un même peuple, bien qu’ils soient divers, restent les mêmes frères, on se rend compte de cela surtout dans les situations de crise. Toujours est-il que, dans les groupes humains où ce sentiment est absent, il n’y a que chaos et désolation, parce que toute société est condamnée à faire rayonner la fraternité. Moi, je peux vous dire une chose : dans la démocratie, le principe d’égalité ne prévaut pas sur le principe de fraternité, car tout commence à se dresser à partir de l’existence de la fraternité, c’est le centre de masse de la démocratie.
C’est sur cette anecdote que notre ouvrage se repose. Je vous précise que la diaspora africaine, surtout malienne, n’honore guère l’esprit fraternel comme à l’époque des indépendances, donc avant que je naisse. Notre génération doit être celle qui s’inspire de celle des indépendances, pas de celle commençant par les amusements de 1991. A la base, c’est ma belle grand-mère (paix sur son âme) qui fut la première à nous raconter ce court récit quand nous étions enfants et turbulents. Ensuite, à mon tour de « franciser » ce conte, en le parfumant à ma guise, en le modernisant.
Pourquoi avoir écrit ce conte ?
Ma motivation est rappeler l’importance de la fraternité aux Maliens, pas forcément aux autres, mais les Maliens.
Pourquoi ce titre ‘’L’Esprit de la fraternité’’ ?
J’ai choisi ce titre pour personnifier la fraternité. Le syntagme ‘’Esprit de la fraternité’’ est d’abord incorrect, on devrait dire « esprit de fraternité », mais pour des raisons de personnification, j’ai choisi ainsi. Le titre en lui-même est susciterait le lecteur à lire le livre, c’est aussi pour des raisons commerciales.
Pourquoi le choix du conte ?
J’ai choisi le conte, parce qu’essentiellement ce texte existait déjà dans notre patrimoine culturel, mais ignoré du grand public. Dans le Bélédougou profond, ce conte est encore vivant. Seulement, j’ai usurpé la paternité grâce à la force de l’écriture. Ce genre nous donne la liberté d’aller au-delà du réel. Ainsi, le surréalisme va me permettre de créer du merveilleux qui est l’essence même des contes africains (l’on rencontre l’anthropomorphisme et le zoomorphisme par exemple). Le conte aussi, parce que c’est le genre le plus aimé des enfants : les enfants aiment les choses magnanimes parce qu’ils se croient dans la peau des adultes, les expressions qui les rendent curieux. Imaginons que j’avais écrit ce conte en vers et non en prose, il passerait peut-être pour du théâtre baroque, ce qui ne toucherait pas vraiment à la sensibilité des enfants, tant le discours des personnages seraient dégoutant à leurs yeux, on pourrait voir par exemple du sang, de l’incendie, de la peur…Les bons enfants ont leur façon de penser, ainsi il est évident de choisir le conte pour satisfaire leur imagination.
C’est donc les enfants le public visé ?
Le public visé, c’est l’enfance et l’adolescence. Mais, les adultes pourraient le lire aussi.
Cela vous fait quoi de voir votre premier ouvrage publié ?
C’est un plaisir pour moi. Cela me donne le courage d’écrire, parce que l’écriture est essentiellement destinée aux hommes. On écrit pour être lu, et quand on est lu c’est un plaisir et l’auteur se sentirait encore plus peut-être bien, j’espère. Je souris un peu.
Avez-vous d’autres projets d’écriture ?
J’ai d’autres projets d’écriture, dans le domaine de la recherche scientifique, notamment en sciences du langage : je dois travailler sur des lexèmes du bamanankan qui sont liés à notre culture afin que leur vraie morphologie soit découverte. Ainsi, si tout va bien, il y aura gain de cause.
Quel sera votre dernier mot ?
Mon dernier mot, c’est de dire aux Maliens que nous avons d’autres batailles urgentes à mener : retravailler notre conception sur l’esprit de la fraternité, l’esprit collectiviste, au lieu de s’organiser en de groupuscules contraires. Je fais confiance dans les gens qui me liront, j’espère qu’ils me comprendront. Merci.
Youssouf Koné
Source: Aujourd’hui Mali