La grève illimitée des magistrats en cours depuis près de trois mois risque de créer une crise entre le pouvoir judiciaire et le pouvoir exécutif. Malgré le caractère légitime du mouvement, le Premier ministre veut réquisitionner des magistrats. Un avis fortement regrettable pour les magistrats.
En fin de semaine, les présidents du Syndicat autonome de la magistrature (Sam) et du Syndicat libre de la magistrature (Sylima) ont échangé sur l’évolution de la grève illimitée en cours. Occasion pour les deux leaders, Hadji Macky Sall et Aliou Badara Nanacassé, de revenir sur la détermination et surtout la constance dont les militants font preuve depuis le début du mouvement.
Pour les présidents, la grève se trouve à une phase déterminante où seuls le sens aigu des responsabilités et surtout l’exigence incontournable de dignité de tous sont sollicités. Mais, préviennent-ils, depuis quelques jours, les manœuvres ont commencé à se multiplier et à revêtir des formes beaucoup plus préoccupantes.
« Outre la velléité affichée et assumée par le gouvernement de la République de tenir en laisse le pouvoir judiciaire, le président de la Cour suprême du Mali a décidé de s’allier à l’exécutif et semble soutenir, dans un avis donné par l’auguste Cour, que la présente grève des magistrats serait illégale quand bien même nous avions soutenu le contraire », affirment-ils.
« Nous observons que cet avis, qui ne vise qu’à cautionner la volonté du Premier ministre à réquisitionner certains magistrats, est fortement regrettable en ce que non seulement les conditions requises pour user de la réquisition ne sont pas réunies dans le cas d’’espèce mais aussi et surtout, pour ce faire, le président de la Cour suprême est revenu sur un premier avis émis par la chambre consultative de la Section administrative de la Cour suprême », expliquent-ils.
Les présidents du Sam et du Sylima rassurent les magistrats que les bureaux exécutifs des deux syndicats se sont réunis sur cette évolution de la situation. « Nous avons pris toutes les dispositions pour faire échec à ce complot contre l’institution judiciaire ». Tout en invitant les dignes et braves militants à plus de vigilance, les leaders syndicaux assurent les magistrats du Mali de leurs sentiments militants…
Au regard de l’analyse des deux syndicats, cette grève illimitée des magistrats en cours depuis près de trois mois risque de créer une crise entre le pouvoir judiciaire et l’exécutif. Visiblement une main cachée du Premier ministre voudrait saboter les magistrats dans leur lutte qu’ils estiment noble. Selon eux, la réquisition à laquelle le chef du gouvernement veut se hasarder est un coup contre le mouvement malgré son caractère légitime.
Bréhima Sogoba
L’Indicateur du Renouveau du 9 octobre 2018