L’arrivée des tricycles, couramment appelés « Katakatani«  en langue bambara, sur le marché oblige beaucoup de ‘’pousse-pousseurs’’ à se transformer en conducteurs de tricycle. Le temps est dur pour ceux qui s’accrochent encore à leur engin à deux roues.

« On a plus de marchés », s’inquiète Abdoulaye Bagayoko. Malgré le temps difficile qu’il traverse, M. Bagayoko s’accroche encore à sa petite barre de pousse-pousse. « C’est le seul métier que j’exerce », se console l’ouvrier.

A son arrivée dans la capitale, Abdoulaye a posé ses valises à Faladjè, il y a de cela trois ans. C’est dans ce quartier qu’il cherche son gagne-pain. C’est la « misère », selon le travailleur depuis la prise d’assaut des marchés par les tricycles. « Je pouvais gagner 5 000 F CFA par jour, maintenant notre revenu ne dépasse pas 1000 F CFA. Des fois, tu passes la journée sans avoir un F CFA », regrette-il. Pour autant, le jeune espère toujours et ne compte pas changer de métier. Lassi Koné, quant à lui, s’est reconverti. Il est devenu conducteur de tricycle. Avant, il livrait des marchandises en pousse-pousse. Il explique son choix : « avant je livrais des sacs de fonio et du maïs dans un pousse-pousse. J’ai changé de métier quand je suis arrivé à Bamako parce que le tricycle est plus rapide que le pousse-pousse. Je gagne plus d’argent maintenant », se réjouit-il. L’unique soucie de M. Koné est qu’il n’a pas encore sa propre moto. Les revenus journaliers de l’ouvrier ne lui permettent pas encore de se l’offrir. Le prix des tricycles varie entre un million de F CFA à 1 350 000 F CFA, selon les marques.

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« C’est difficile quand on travaille avec la moto d’un particulier. Des fois, tu ne gagnes que 2 000 F CFA toute la journée et là tu dois verser obligatoirement au propriétaire sa recette. Je dois lui verser 4 000 F CFA chaque soir », révèle-t-il.

Face à la concurrence, le désormais conducteur de tricycle s’est adopté une nouvelle stratégie : baisser les tarifs du transport afin de bénéficier de plusieurs voyages par jour.

Un projet qui dérange ?

Importés de la Chine, du Japon ou de l’Inde, la capitale de Bamako est maintenant pleine de tricycles ou « Katakatani », nom tiré du bruit que ces engins émettent dans leur course folle. L’arrivée de ces motos au Mali, au départ, était un projet de l’Agence nationale pour l’emploi des jeunes (ANPE). Elle voulait, à travers l’initiative, soutenir l’emploi des couches sans diplôme tout en facilitant l’accès à certains quartiers périphériques de Bamako.

Depuis lors, il est devenu un moyen de transport qui a séduit la population, les centres de santé communautaire de Bamako et de l’intérieur du pays. Il est aussi devenu une source de revenue pour les propriétaires et conducteurs. Mieux, beaucoup d’entreprises privées l’utilisent dans la livraison de leurs produits.

Présentement à Bamako, ces engins à trois roues sont pointés du doigt par les ‘’pousse-pousseurs’’ « qui accusent les propriétaires de rafler tout le marché de transport urbain de marchandises ». Par ailleurs, la situation arrange d’autres. Pour Mamadou Nimaga, usager, le transport des marchandises par les tricycles est bénéfique et son prix de transport est abordable plus que les autres moyens de transport, notamment les taxis et les Sotramas.

Le même avis est partagé par Zoumana Sangaré. Commerçant détaillant au grand marché de Bamako, M. Sangaré affirme que c’est une très belle initiative. « Ces moyens de transport ont été mis à la circulation parce qu’il y avait un besoin quelque part ».

« Au vu des problèmes causés dans la circulation par ces engins, les avantages sont minimes », constate Mamadou Kantara, étudiant. Il se défend : « ils se stationnent mal et créent beaucoup d’embouteillages ». Pour l’étudiant, il n’y a pas de demi-mesure, « il serait préférable d’interdire leur circulation à Bamako ». La décision de Mamadou n’est pas une solution, estime Kadidiatou Traore, ménagère.

« La plupart de ces conducteurs viennent du village et ne connaissent pas le code de la route », dit-elle, appelant la mise en place d’un cadre légal pour règlementer le domaine.

Minimiser les risques d’accidents

La réglementation de la circulation des tricycles est parmi les solutions que proposent les usagers de la capitale pour minimiser les risques d’accidents provoqués par ces motos. Le nouveau code de la route, en cours d’élaboration, saisit la question. Il prévoit notamment une nouvelle catégorie de permis de conduire pour les conducteurs de tricycles, l’introduction de la carte grise, de l’assurance, de la visite technique et leur plaque d’immatriculation.

En attendant son adoption, la mairie du district, à travers son arrêté n°041/M-DB, délimite les itinéraires des tricycles à moteur dans le district de Bamako. Leur déplacement n’est pas autorisé sur certains axes stratégiques dont : le pont des Martyrs, les routes de Koulikoro, de Sébénikoro, celle de l’aéroport de Bamako-Sénou, la section de voie du boulevard de l’Indépendance comprise entre le Monument de l’indépendance et l’échangeur de l’Ena et la section de la voie de la route de Koulouba comprise entre le Parc national et le rond-point de Koulouba. La circulation des tricycles est également interdite sur la voie des trente mètres de Niamakoro depuis la Tour d’Afrique jusqu’au poste de contrôle de Kalabancoro.

La décision, en vigueur depuis octobre 2015, interdit aussi la circulation des tricycles de 19h30 à 6 heures du matin sur les voies goudronnées.

Sur le pont Fahd, ces engins à moteur à trois roues peuvent passer entre 10 h et 15h. L’horaire est fixé de 6h à 19h30 sur le pont de l’Amitié sino-malienne encore appelé 3e pont.

Près de quatre ans après l’entrée en vigueur de l’arrêté, la mesure est-elle respectée ? A notre passage sur la section de la voie de la route de Koulouba comprise entre le Parc national et le rond-point de Koulouba et le pont Fahd, les policiers de la Compagnie de la circulation routière veillaient sur le respect de la mesure.

Kadiatou Mouyi Doumbia

Marthe Dembélé (stagiaire)

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