Numéro matricule ? 797-85 G. Profession ? Magistrat de grade exceptionnel. Nom ? Mohamed Chérif Koné. En costume ou en boubou traditionnel, l’homme a généralement le visage fermé comme s’il était en méditation. Il déstabilise facilement son interlocuteur.

Après avoir fait du terrain à travers le Mali pour exercer son métier, il a rejoint en 2013 la Cour suprême d’où il a été débarqué en 2021. Il n’a pas apprécié ce qu’il appelle « la brutalité » de son limogeage. L’homme prend sa plume : « Le décret de ma révocation est source de discrédits sur l’image de la haute administration publique de l’Etat. Ce décret, quoique restant un non-événement, en tant qu’émanant d’un gouvernement de Transition n’ayant aucune légitimité démocratique, les termes désobligeants qui portent atteinte à mon honneur et à ma considération commandent de réagir dès maintenant », réplique-t-il.

Au sein de la Cour suprême, il a notamment occupé les fonctions de premier avocat général. Aujourd’hui, il ferraille avec ses anciens collègues de la Cour suprême. Première slave ? Il revient sur la mort de l’ancien Premier ministre Soumeylou Boubèye Maïga mort en détention il y exactement un an (21 mars 2022). Face à son expression « tragédie judicaire » pour évoquer le sort de celui qui fut avant dernier Premier ministre de l’ex-président Ibrahim Boubacar Kéita (« IBK »), la Cour suprême qui a inculpé celui qu’on appelle aussi par ses initiales « SBM » sort un communiqué musclé : « (…) Depuis quelques temps, des personnes, magistrats de leur état respectif en mal d’inspirations conformes aux bonnes mœurs, ont choisi d’intervenir par voie de presse pour porter de graves accusations à l’endroit des magistrats en charge de la gestion de dossiers d’instruction pendant devant la Cour suprême. C’est ainsi que l’on a pu entendre des expressions aussi graves que malheureuses telles que ‘tragédie judiciaire’, ‘assassinat’, de personne faisant naguère l’objet d’inculpation »… Et pour boucler la boucle, le communiqué de la Cour suprême menace de traduire devant les tribunaux à mots couverts Mohamed Chérif Koné.

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Le magistrat-rebelle de 64 ans ne capitule pas. Il monte encore une fois au créneau et dénonce certains de ses ex-collègues qui selon lui n’auraient pas fait leur job.

Dossier d’équipements militaires…

Un autre dossier dans lequel il est présent médiatiquement ces derniers temps, est celui dit « des équipements militaires » et de l’achat de l’avion présidentiel. C’est une affaire qui date de l’époque où le président Ibrahim Boubacar Kéita (« IBK ») était au pouvoir. La justice malienne a lancé récemment des mandats d’arrêt contre des personnalités maliennes. Mais pour Chérif Koné, « la justice ne doit pas servir des causes politiques. Elle doit être indépendante ». Il sort de son cartable, « un avis de classement sans suite », signé du procureur du Pôle économique et financier de l’époque Mahamadou B. Diawara.

« Le Procureur de la République… (Avisé le directeur général du contentieux de l’Etat du classement sans suite… ») indique le document. Et comme si l’arroseur a été arrosé, c’est l’Etat malien qui finalement a été condamné à verser des dommages-intérêts à des hommes d’affaires, après les avoir mis hors de cause. Des hommes politiques avaient également à l’époque finalement été mis hors de cause par la justice.

Chérif Koné qui était à l’époque premier avocat général de la Cour suprême (plus haute juridiction malienne) répète à l’envi : « C’est un faux dossier ».

Nouvel opposant politique ?

Le 20 février 2023 dans la capitale malienne, plus d’une dizaine de partis et regroupements de partis, d’organisations de défense des droits humains et de la société civile, rendent public un manifeste : « Appel du 20 février pour sauver le Mali », avec pour objectif de fédérer les forces vives maliennes pour faire échec au projet de la nouvelle Constitution dont le pays n’a nullement besoin selon eux.

La cérémonie de lancement de cette nouvelle alliance politique a été interrompue par une intervention brutale d’hommes dont certains étaient cagoulés. Mais les ténors de « l’Appel du 20 février pour sauver le Mali » ont eu également le temps de déclarer que « les Maliens souffrent à cause des politiques inconséquentes de ceux qui nous gouvernent ».

Le magistrat Chérif Koné est le coordinateur des mouvements membres de l’Appel du 20 février. Donc il a désormais un autre pied dans la politique.

Va-t-il franchir le Rubicon ? Rêve-t-il du grand soir ?

Lamine Cissé

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